Adieu à la Nouvelle France
2018-2019
Chronique des profs n°10
jeudi 21 février
La nuit fut paisible. Pas de patrouille de blousons rouges dans les couloirs à des heures indues, pas de chahut dans les chambres : dument avertis des risques encourus à perturber le sommeil professoral, les saintexplorateurs ont adopté un comportement irréprochable.
Réveil au clairon hôtelier à 7h pour un rendez-vous programmé 45 minutes plus tard dans le hall. Las ! À l’heure dite, point de demoiselles ! Seuls les garçons répondent à la pelle à neige. Nous sommes pourtant attendus à la Maison du spaghetti pour un buffet de petit-déjeuner, copieux parait-il, à 8h15 et le bus attend déjà. Les deux dernières chambrées féminines s’extraient de l’ascenseur avec un bon quart d’heure de retard, ce qui va nous obliger à abréger d’autant la collation matinale. En effet, nous avons une bataille majeure à livrer dès dix heures ! Maël s’affole un instant pensant avoir oublié son téléphone dans sa chambre quand il est dans sa poche de veste…
Nos blousons rouges semblent avoir jeuné la veille tant leur appétit fait plaisir à voir : omelette, saucisses, pommes de terres grillées, jambon cuit, pancake, pain perdu, tartines de confiture…rien ne les rebute. Tout particulièrement Aubin qui se sert un grand verre de sirop d’érable qu’il a confondu avec une boisson gazeuse célèbre dont le manque se fait sentir chaque jour un peu plus pour certains (et certaines).
Au Musée des Plaines d’Abraham, nous sommes attendus par deux générales en uniforme, l’une française, l’autre britannique incarnant les commandants en chef des deux armées qui s’affrontaient pour leur pays respectif durant ce tragique été 1759 qui fut si déterminant pour l’histoire du Canada et de la France. Les deux animatrices du Musée qui endossent avec conviction et humour ce rôle éducatif, narrent, tableau numérique interactif à l’appui, le déroulement de la célèbre bataille des Plaines d’Abraham. Le lieutenant- général Montcalm, envoyé par Louis XV pour défendre la Nouvelle-France face aux visées britanniques devait faire face au jeune général James Wolfe qui menait 18 000 soldats professionnels entrainés et expérimentés et une importante flotte de guerre. Dans le camp français, une bonne partie des troupes était constituée de miliciens indisciplinés et de guerriers amérindiens issus de dix-huit tribus distinctes et les ressources navales étaient plus réduites. Au bout de trois mois de siège Québec était détruite à 80% par les obus et les bombes incendiaires anglaises. Au bout de trente minutes de bataille, les deux généraux avaient été tués et les Anglais étaient maîtres du terrain. La cité de Champlain se rendait quelques jours plus tard.
La seconde partie de la séance est destinée à l’enseignement accéléré du maniement du fusil à poudre employé en 1759 lors de la bataille puis à celui d’un canon de six livres. Nos courageux blousons rouges partagés en deux camps et quatre équipes, s’initient au chargement de leur arme individuelle avec plus ou moins de talent. Je suggère par exemple de laisser Allan s’occuper du café plutôt que du lourd mousquet de l’époque et de dissuader Maïa de poursuivre dans cette voie.
La formation de canonnier suppose une division en tâches spécialisées et donc un travail en équipe où nos blousons rouges (accusés pour l’occasion de porter l’uniforme britannique) affirment quelques compétences. Gabriel n’a pas son pareil pour nettoyer le fut de la pièce alors que Maëlys excelle dans son bourrage.
Dernière étape, les blousons rouges doivent identifier la fonction respective de quatre objets d’époque. A savoir, un boulet à mitraille, un appareil de trépanation crânienne, une arracheuse de dent et une brosse à boutons.
Il s’avère ensuite que l’état de la blessure reçue à la jambe par Anaëlle (devenue Georges pour l’occasion) au cours de la bataille nécessite une amputation immédiate. Les divers instruments chirurgicaux employés inspirent une répulsion immédiate d’autant qu’ils ne sont jamais désinfectés entre deux blessés puisque le sang, toujours rouge, est identique d’une personne à l’autre…. (sic)
Disons-le, Georges supportera courageusement l’opération qui la mutile pendant une minute.
Nous quittons le Musée pour rejoindre les chutes de Montmorency à l’Est de Québec Il a neigé dans la nuit et les flocons volètent avec allégresse au-dessus de la passerelle spectaculaire qui domine la cascade prise dans les glaces. Un détour par le belvédère, un nouvel et ultime égo portrait collectif et nous retrouvons l’autocar.
Désormais, nous roulons vers l’aéroport. Héloïse déclare être contente de rentrer à partir de maintenant puisque nous n’avons plus rien à faire au Canada. Le compte à rebours est enclenché. Une certaine excitation règne dans le bus pour quelques délurées. Les autres remplissent leur carnet de voyage ou exploitent leur appendice électronique. Encore quelques heures en Nouvelle-France puis l’envolée….
Mais demain est un autre jour.
DR